Des petites missions dans la prairie

Contre toute attente, nous voici donc en Amérique du Sud. La Bolivie nous tend les bras ! Du moins, plus à certaines qu’à d’autres. Sarah a en effet eu affaire à un douanier qui, sous le charme de ses grands yeux bleus-verts-gris, lui a délivré un visa de 90 jours dans le pays. Ma coupe de cheveux n’a pas fait le même effet : je n’ai qu’une autorisation de 30 jours et l’obligation de me présenter dans une administration plus tard pour prolonger ce délai… Bref, bienvenue en Bolivie !

A peine arrivés à Santa Cruz, nous décidons de faire une rapide balade dans le centre ville et de nous mettre tout de suite en route pour la première partie de notre voyage. Nous avions en effet planifié (dans l’avion…) de nous lancer dans une aventure qui devrait nous mener dans l’Est de la Bolivie au travers des anciennes missions jésuites. Pour ceux qui n’ont pas vu le film de 1986 « La Mission » avec Robert de Niro, il faut savoir que cette partie du pays a été évangélisée par les Jésuites. Les missions ont rapidement prospéré et des tensions entre l’Espagne et le Portugal ont éclaté assez rapidement. Les Portugais tenaient d’une main de fer leur colonie brésilienne et pratiquaient l’esclavagisme sans vergogne. Les Espagnols, eux, semblaient plus « catholiques » dans leur façon de diriger la Bolivie et ne s’immisçaient pas dans la politique portugaise. Les Jésuites installés à la frontière de ces deux colonies commençaient à faire de l’ombre aux affaires portugaises. Le tout combiné entraîna la région dans un bain de sang général dont les indigènes souffrirent beaucoup (c’est le moins que l’on puisse dire). Aujourd’hui, la région a été inscrite au patrimoine mondial de l’UNESCO et nous sommes sur le point de nous y immerger.

Bref, notre tour commence par la mission de San José. Nous sommes tout de suite estomaqués par la beauté du site.

Et, cette beauté ne s’arrête pas au bâtiment en lui-même. Nous sommes immédiatement présentés au Père de la mission (« El Padre ») qui nous propose sans hésiter de planter notre tente dans l’enceinte de celle-ci avec accès complet aux sanitaires (toilettes, douche…). On ne peut rêver mieux comme accueil et introduction à notre circuit.

Notre premier souper bolivien est très bon mais nous laisse un peu perplexes. Il s’agit de poulet accompagné de riz… de frites… et de spaghettis ! Le tout servi copieusement pour l’équivalent de 1,5 €. Nous ne manquerons donc pas de féculents… Les légumes sont par contre absents de l’assiette.

Nous apprendrons également ce soir là que les Boliviennes ne semblent pas attacher d’importance à la longueur de leur jupe ni à leur décolleté lorsqu’elles fréquentent les églises. Personne d’ailleurs ne semble s’en offusquer, nous décidons donc d’en faire de-même (de ne pas nous offusquer… je vous rassure, je ne porte pas encore de soutien-gorge).

Le lendemain, nous sautons dans un bus à destination de la prochaine mission. Nous sautons apparemment tellement bien qu’un des amortisseurs ne tient pas le coup et nous sommes obligés de déplacer tous les passagers du côté gauche du bus histoire d’arriver entiers à destination. Pari réussi, nous atteignons San Rafaël sans trop d’encombres. Nous y sommes charmés par la vie rurale. Rien ne semble avoir changé depuis des siècles : les cow-boys « garent » leurs chevaux pour aller faire leurs courses et les dames âgées ont la même garde-robe depuis leurs 20 ans.


C’est là que nous rencontrons nos premiers problèmes de transport. Plus aucun bus ne part du village à partir de 11h00. Nous tentons donc l’auto-stop et voici ce qui s’étend devant nous :

La route est aussi fréquentée que…….. En fait non, il n’y a aucun comparatif belge qui puisse permettre de prendre la mesure de ce taux de fréquentation si bas (je viens pourtant de passer 10 bonnes minutes à y réfléchir). Bref, nous n’avions aucune chance de trouver un lift. C’était évidemment sans compter sur notre bonne étoile qui nous permit de nous retrouver dans un camion en moins d’une demi-heure.

Nous voici à la mission de Santa Ana, le village le plus éloigné que nous aurons l’occasion d’atteindre. Et c’est peu dire ! Pour souper, nous devons aller trouver la « Senora de la pension » directement chez elle. Elle nous accueillit d’un « Qué passa ??? » bien rugueux qui nous fit craindre le pire mais nous nous trompions : elle nous amena à son restaurant, l’ouvrit spécialement pour nous et prit soin de nous pendant une bonne partie de la soirée, le tout arrosé de musique latino bien plaisante.

De nouveau, nous sommes accueillis par les gens de l’Eglise comme il se doit. Une partie du jardin nous est allouée et c’est bien installés que nous passons la nuit dans notre tente.

Nous décidons de prendre part à la messe du dimanche matin. L’église nous semble immense pour ce si petit village mais nous assistons peu à peu à l’arrivée des habitants qui rejoignent doucement les lieux (c’est à dire à pied). Certains amènent des instruments de musique, notamment des violons.

Les indigènes de l’époque auraient été charmés par les mélodies et instruments apportés par les missionnaires, ce qui a permis un dialogue plus aisé (et une conversion plus simple, il faut le dire). Cette tradition est encore bien ancrée ici ! La messe est magnifique et les paroles du Père sont régulièrement suivies d’interludes musicaux.

Pour bien se remettre de ce moment magique, on décide d’aller déjeûner et, grâce aux indications des habitants, on trouve un petit endroit qui ressemble à un restaurant. Au menu, « Pansa de Vaca ». Ne parlant pas espagnol, Sarah pense qu’il s’agit de champignons tandis que je pense plutôt à du pain, Camille ne se prononçant pas. Nous en commandons trois plats.Il ne faut pas une seconde pour réaliser qu’il s’agit d’un aliment d’origine animale. Les filles ne veulent plus y toucher tandis que je fais passer le tout avec un peu de ketchup. Nous apprendrons plus tard qu’il s’agissait d’estomac de vache.

Santa Ana c’est aussi le lieu où nous avons rencontré Luis, gardien de l’église. Fier de son patrimoine culturel, il nous montra l’orgue de l’église et entonna une chanson en Chiquitan (dialecte local). Il la reprit ensuite avec quelques notes d’orgue. Absolument magique.

Pour notre dernier repas, nous trouvons, non sans peine, un restaurant qui se trouve en fait dans la cour privée d’une habitation.

Il est temps pour nous de quitter Santa Ana. Nous sommes à nouveau confrontés au problème des transports. Nous finirons exactement à la même intersection que précédemment en fin de journée. God is with us ! Un camion nous prend en charge assez rapidement. Les chauffeurs de camion roulent parfois très vite et celui-ci, bien que très sympathique, avait son cendrier rempli d’une poudre blanche qu’il frottait juste en-dessous de son nez régulièrement. Sans parler de la panne au milieu de nulle part… Finalement, un bout de sac plastique suffit à réparer le camion et nous arrivons sains et saufs à la mission de San Miguel.

Nous débarquons juste avant la messe et le Père, complètement excentrique, nous accueille avec des rires et sourires en nous indiquant que nous pouvons utiliser une pièce de la mission plutôt que de planter notre tente. L’accueil de ce Père est l’image même de ce que nous retiendrons de notre tour des missions : un accueil incroyable des Boliviens, qui, malgré le peu de mots espagnols que nous connaissons, dégagent une chaleur humaine bien réelle. Avec le temps, on passe officiellement de « no hablo espanol » à « hablo un poco espanol ».

Nous apprenons qu’il existe un atelier où les artisans travaillent du bois, notamment les colonnes que l’on peut voir dans toutes les missions ainsi que toutes sortes de sculptures religieuses. Nous n’hésitons pas et passons une bonne heure sur place.

La suite du voyage sera à nouveau tourmentée par les horaires de bus. Nous n’avons d’autre choix que d’embarquer à la tombée de la nuit pour atteindre Concepcion.

Nous arrivons donc sur la place centrale passé minuit, nous obligeant à réveiller toute une partie du village afin de trouver un logement. Finalement, tout se passera très bien comme d’habitude. Une auberge simple nous permettra de nous reposer et de visiter le petit village le lendemain matin.

Ici, il nous faut payer l’entrée d’un musée pour pouvoir accéder à l’église… Ce qui est assez discutable selon nous et nous n’avons pas manqué d’exprimer notre mécontentement.. Il en sera de même à San Javier que nous visiterons également de manière assez rapide, les missions précédentes étant bien plus accueillantes !


Ce dernier jour marque notre retour à Santa Cruz que nous avions quitté quatre jours plus tôt, synonyme d’une nouvelle aventure bolivienne !

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6 réflexions sur « Des petites missions dans la prairie »

    1. Les paysages sont bien différents de l’Asie mais tout aussi beaux… En ce qui concerne votre repas à base d’estomac de vache, vous imaginez bien ma tête en lisant le menu… M’enfin j’imagine que Ju a du se régaler!! Des gros bisous à tous les 3!

  1. Caramba … encore raté. Difficile d’être le premier à mettre un commentaire, Ju ! Brigitte est imbattable. Très chouette article et pour Alexis, vous avez même photographié un toucan ! C’est juste dommage que vous n’ayez pas photographié Robert de Niro pour moi :). Belle continuation et belles rencontres à vous.

    1. Nous pensons bien à toi à l’heure de prendre quelques cours d’Espagnol à Sucre! Nous nous souvenons de notre première leçon de vocabulaire dans ta cuisine. Bientôt la table, la chaise et la fenêtre n’auront plus de secrets pour nous 🙂

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